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Comment lisent les internautes ?
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Dernière mise à jour : février 2020
« Savoir comment on lit permet ensuite de mieux comprendre comment il faut écrire pour être lu et compris. »
Luc Fayard, Maîtriser son information – 2005
Sommaire
- ► 1) 79% des internautes scannent les pages web
- ► 2) La lecture sur écran est 6% à 25% plus lente que sur papier
- ► 3) Le parcours de lecture dépend du type de page
- ► 4) Le parcours de lecture dépend du support
- ► 5) Le lecteur aime les phrases courtes (15-20 mots maxi)
- ► 6) Le lecteur retient 4 nouvelles informations maximum
- ► 7) Le regroupement (ou chunking) facilite la mémorisation
- ► 8) Le lecteur déduit les mots
- ► 9) Le lecteur moyen connaît 5 à 10% des mots d’un dictionnaire
- ► 10) Plus de 50% des internautes se connectent depuis un mobile
- ► 11) L’internaute aime scroller
- ► 12) L’internaute aime interagir
- ► 13) L’internaute partage sans lire
- ► 14) L’internaute est impatient
- ► 15) L’internaute ignore les bannières publicitaires
- ► 16) Le lecteur souffre d’infobésité
- ► 17) 70% des moins de 30 ans subissent le syndrome du FOMO (Fear Of Missing out)
- ► 18) Le JOMO (Joy Of Missing Out) séduit de plus en plus d’internautes
- ► Bonus : Chiffres-clés du web en France et dans le monde
79% des internautes scannent les pages web*
En 1997, l’expert en utilisabilité Jakob Nielsen publie une étude de référence sur la lecture en ligne. Selon ses recherches, près de 80% des internautes ne lisent pas les pages web mot à mot : ils scannent le texte. L’œil balaie la page, guidé par les images et les différents niveaux de lecture (titre, accroche, intertitres, listes à puces, encarts). Cela a une incidence sur la façon d’écrire pour le web.
La lecture sur écran est 6% à 25% plus lente que sur papier
En 1997 et 2010, Jakob Nielsen (encore lui) compare la vitesse de lecture entre livre imprimé, écran d’ordinateur, iPad et Kindle (la liseuse d’Amazon). Conclusions : la lecture sur écran d’ordinateur serait :
- 25% plus lente que sur papier
- la lecture sur Kindle est 10% plus lente que sur papier
- la lecture sur iPad est 6% plus lente que sur papier
En cause :
- la luminosité : le rétroéclairage fatigue l’oeil
- la résolution d’écran : lire sur écran large 24 pouces 1920 x 1200 pixels prend plus de temps que sur un petit écran de smartphone 5,7 » full HD
- le contraste entre le texte et le fond : un texte blanc sur fond noir s’avère plus reposant pour l’oeil (et pour la planète car cela consomme moins d’énergie)
- la police de caractère : sur le web, une typographie avec serif (ex : Time New Roman), en italique et majuscule freine la lecture. Tandis qu’une font sans sérif (ex : Arial, Helvetica, Calibri) avec un interlignage approprié (1 ou 1,5) rend le texte facile à lire
- la posture : moins confortable de lire la tête courbée sur un PC ou une tablette, au niveau des cervicales notamment.
Le parcours de lecture dépend du type de page
En F, en Z en X… De nombreuses études oculométriques (eye-tracking) analysent comment lisent les internautes. Dans les pays occidentaux où la lecture se fait de gauche à droite, les zones chaudes (qui captent le plus l’attention) se situent généralement en haut à gauche des pages web. En fait, l’oeil fixe telle ou telle zone selon le contenu et sa mise en page. On distingue plusieurs types de formats, plus ou moins fragmentés :
- page de résultats Google
- fiche-produit de site e-commerce
- article long de 300 mots et + (billet de blog, dossier de fond, interview, page Wikipedia)
- brève d’actualité +/- 100 mots
- landing page
- newsletter
Article long, fiche-produit ou page de résultats Google : selon les études d’eyetracking menées en 1997 par Jakob Nielsen, l’internaute occidental lit plutôt en F sur écran d’ordinateur. Les zones les plus lues se trouvent en haut à gauche.
Le parcours de lecture dépend du support
Depuis l’arrivée de l’iPhone en 2007 puis de l’iPad, les supports tactiles ont considérablement bouleversé les usages. Le mobinaute n’hésite plus à scroller. Les analyses ci-dessous montrent que les mouvements oculaires change selon qu’il s’agit :
- d’un texte long
- d’une carte GPS
- d’une page de résultat Google
- d’un profil de réseau social
- d’une liste avec des visuels type annuaire en ligne, etc
Comparaison de la lecture sur smartphone
Le lecteur aime les phrases courtes (15-20 mots maxi)
Les études d’eye tracking le prouvent : plus une phrase est longue, moins on la mémorise.
Taux de mémorisation d’une phrase selon le nombre de mots
Luc Fayard, Maîtriser son information – 2005
Sur le web, la longueur idéale d’une phrase est de 12 mots maxi. Au delà de 15-20 mots, le taux de mémorisation du message chute. Comment rédiger des phrases courtes ? Des astuces existent par exemple :
- Ecrire au présent de l’indicatif
ex : La sortie en salle du 5e opus d’Indiana Jones est prévue pour juillet 2021 (14 mots)
devient : Indiana Jones 5 sort en salle en juillet 2021 (9 mots) - Privilégier la voix active
ex : Les tomates-cerises peuvent être semées en mars (8 mots)
devient : Semez vos tomates-cerises en mars (6 mots)
- Eviter la forme négative
ex : Vous ne savez pas quoi visiter en Bretagne (8 mots)
devient : Vous vous demandez que visiter en Bretagne (7 mots)
Le lecteur retient 4 nouvelles informations maximum
…et pas 7 (+/-2). Selon la consultante en pédagogie J. Farrington, l’individu moyen mémorise 3 voire 4 nouvelles informations simultanément. Un chiffre qui remet en cause le fameux nombre magique de la loi de Miller (1956). Selon ce psychologue américain, la mémoire de travail est capable de retenir 7 (+/-2) informations.
Le regroupement (ou chunking) facilite la mémorisation
Quelle série de 10 chiffres vous paraît la plus facile à retenir ?
- a) 0 6 3 3 8 1 1 1 0 3
- b) 06 33 81 11 53
- c) 0633 811 103
La c) biensûr. Grouper l’information en petits morceaux (chunks en anglais) demande moins d’effort mental pour la mémoriser.
Le lecteur déduit les mots
Nous cessons de lire dès que nous avons compris l’information. Le professeur en psychologie cognitive Philip Johnson-Laird parle de deductive satisfaction.
Cap’ ou pas cap’ de comprendre ce texte ?
Dégradation de Cambridge
L’oeil voit le mot comme une image. Le cerveau identifie les groupes de lettres et leur position. Voilà pourquoi vous faites parfaitement la différence entre les anagrammes UTILE et TUILE par exemple.
Le lecteur moyen connaît 5 à 10% des mots d’un dictionnaire
Le Petit Robert compte 60 000 mots. Selon l’échelle Dubois-Buyse, un individu ayant le français comme langue maternelle connaît 3000 à 5000 mots. Ce vocabulaire disponible varie selon l’âge et le niveau d’étude :
- Collège : 600 à 800 mots
- Lycée (Niveau Bac) : 1 500 mots
- Études supérieures : 3000 à 3500 mots
Plus de 50% des internautes sont des mobinautes
A l’échelle mondiale, smartphones et tablettes tactiles ont supplanté la navigation « desktop » depuis fin 2016. En France, l’ordinateur reste toutefois le terminal de prédilection des internautes. En janvier 2020, l’accès au web se fait :
- à 53% via l’ordinateur (desktop)
- à 43% via mobile
- à 4% via tablette
En France, on se connecte plus à internet depuis un ordinateur (53%) que par smartphone (43%) ou tablette (3%)? La tendance est toutefois à la baisse.
A l’échelle mondiale, l’accès au web se fait à 50% via un ordinateur et 50% smartphone. Le trafic mobile (ici en vert) a même dépassé le trafic desktop fin 2016.
Un chiffre à nuancer selon les tranches d’âge : les 15-24 ans passent en moyenne 58 min/jour sur leur smartphone (contre 33 min pour les Français tous âges confondus)*.
Un conseil : développez votre site internet en mode mobile-first (optimisé pour les supports mobiles en premier). Cette approche est plus avancée que le responsive design (site web réactif qui s’adapte à toutes les tailles d’écrans). Avantage : une offre une expérience utilisateur optimale aussi bien sur smartphones et tablettes que sur ordinateur.
L’internaute aime scroller
Longtemps les experts de l’ergonomie web ont préconisé de placer le contenu stratégique au-dessus de la sacro-sainte »ligne de flottaison » ( »above the fold » en anglais). Ce terme désigne la limite entre le 1er et le 2e écran lors du défilement d’une page web. Une étude Chartbeat de 2017 vient nuancer cette bonne pratique : 66% des internautes focalisent leur attention après le premier écran. Le scrolling induit par les smartphones et tablettes tactiles a fait évoluer les usages. Pour preuve les annonces Google Ads. Vous en trouvez maintenant tout en bas de la page de résultats.
Une étude Chartbreat de 2017 démontre que 66% des internautes focalisent leur attention sous la ligne de flottaison. Pensez à placer vos boutons d’action en bas page !
L’internaute aime interagir
Clic, tap, swipe, scrol : sur le web (avec les supports tactiles plus que jamais), le lecteur est aux commandes. Il a besoin d’agir, de cliquer sur des liens ou des boutons, de visionner des vidéos. Il peut donner son avis (likes, commentaires, contribution sur un forum) et partager des liens sur les réseaux sociaux. Autant de distractions qui favorisent la lecture en diagonale.
L’internaute partage sans lire
Les feedbacks reçus sur les réseaux sociaux incitent à partager toujours plus de contenus (curation sur Twitter, veille professionnelle sur LinkedIN, etc). D’après une étude Nielsen Norman Group datant de 2013*, le taux de lecture d’un contenu web chute en cours d’article :
- le 1er paragraphe capte 81% des lecteurs
- 2e paragraphe : 71%
- 3e paragraphe : 63%
- 4e paragraphe : 32%
Plus de 125 000 partages pour cet article… en latin.
L’internaute est impatient
Sur mobile, 53% des utilisateurs quittent une page si elle s’affiche en plus de 3 secondes (source : Google 2018). C’est pourquoi la vitesse de chargement devient un critère de référencement naturel de plus en plus déterminant. Plus votre page web est légère et rapide apparaître, mieux vous vous positionnez dans les résultats Google. Voilà 2 outils gratuits pour mesurer le temps de chargement de vos pages internet :
L’internaute ignore les bannières publicitaires
Bannières clignotantes, liens sponsorisés Google, à force de trop les voir on ne les voit plus. Sticky avance le chiffre de 77% d’e-publicité non vues par les internautes. ComScore 54%. L’étude Digital Report 2020 indique que 44% des internautes français utilisent un bloqueur de publicité.
Les internautes français et leur vie privée
L’utilisation des données personnelles et les fake news préoccupent les Français (respectivement 60% et 67% des internautes)
Le lecteur souffre d’infobésité
‘‘L’humanité a produit au cours des 30 dernières années plus d’informations qu’en 2 000 ans d’histoire et ce volume d’informations double tous les 4 ans’‘. C’est ce que Patrice Aron et Catherine Petit affirmaient en 1997 dans Le Monde Informatique*.
Selon IBM, 90% des données de 2018 ont été générées au cours des 2 années précédentes, soit, 2,5 trillions de bits.
Le web chaque minute en 2020
Les internautes saturent d’information. Notifications sur mobiles, affichage urbains, pub à la radio et à la télé : ces multiples sollicitations visuelles, auditives et cognitives créent une surcharge informationnelle.
70% des moins de 30 ans subissent le syndrome du FOMO (Fear Of Missing Out)
Selon une enquête Sociovision de 2018, 70% des Français de moins de 30 ans admettent être incapables de se passer d’internet (55% des 15 à 75 ans). Ces chiffres illustrent le fameux syndrome du FOMO (Fear Of Missing Out, ou »peur de manquer quelque chose » en anglais). Un trouble d’anxiété sociale mis en lumière par l’expert en marketing Dan Herman dans les années 2000. Il s’agit de la crainte de passer à côté de la dernière tendance sur le web (série télé en vogue sur Netflix, vidéo virale, mème internet, etc). En e-commerce, les annonceurs jouent sur le FOMO pour susciter l’urgence à grand renfort de comptes à rebours et autre indicateurs de stocks :
Chez Cdiscount, c’est un compte à rebours qui crée l’urgence
Sur Booking.com, les hébergements restants sont indiqués en rouge
Le JOMO (Joy Of Missing Out) séduit de plus en plus d’internautes
Au FOMO s’oppose le JOMO (Joy Of Missing Out), théorisé par Anil Dash. Dans un quotidien surconnecté, l’entrepreneur américain prône la »joie de louper » la dernière geekerie, le retour à la vie réelle et aux sensations tangibles. Parallèlement, 37% des internautes souhaitent réduire le temps passé sur les écrans de smartphones, tablettes et ordinateurs (étude Social Vision 2018). Le chiffre progresse même de +5 points de par rapport à 2017. le JOMO est donc une tendance de fond, qui se confirme d’ailleurs par l’engouement pour le Droit à la déconnexion et autres cures de Digital Detox.
Chiffres clés des usages du web
Source : Digital Report 2020
Dans le monde
- 4,54 milliards de personnes ont accès à internet en 2020 (soit 59% de la population mondiale)
- 5,19 milliards d’individus ont un téléphone mobile (67% de la population mondiale)
- 3,80 milliards d’internautes sont actifs sur les réseaux sociaux (49% de la population mondiale)
En France
- 58,03% millions de Français ont accès à internet en 2020 (soit 89% de la population)
- 65,53 millions de Français ont un téléphone mobile (100% de la population)
- 39 millions d’internautes français sont actifs sur les réseaux sociaux (60% de la population mondiale)
*Sources
Mary Meeker’s – Internet trends report 2019
Patrice Aron et Catherine Petit, « L’info, nerf de la guerre », in Le Monde Informatique, Dossier Intelligence, 1997
Luc Fayard – Maîtriser l’information, 2005
Jeanne Farrington – Myths Worth Dispelling : Seven plus or minus two – 2011
Bloqueurs de publicité : Chiffres & tendances en infographie – Weblife, 2016
Bien rédiger pour le web (4e édition) – Isabelle Canivet, 2017
How users read on the web – Jakob Nielsen, 1997
Website reading: it (sometimes) does happen – Nielsen Norman Group, 2013
Scroll behavior across the web – Chartbeat, 2013
Scrolling and Attention – Jakob Nielsen, 2010
Find out how you stack up to new industry benchmarks for mobile page speed – Daniel Ab, 2017
Mobile and tablet internet usage exceeds desktop for first time worldwide – StatCounter, 2020
Infobésité – Comprendre et maîtriser la déferlante d’informations – Caroline Sauvajol-Rialland – 2013
Chiffres-clés interne, – Blog du Modérateur, 2019
L’eye tracking montre que 77% des bannières de 5 TRES gros annonceurs ne sont jamais vues, Ad-Exchange, 2013
Updates to mobile page speed score on the Landing Pages tab – Google 2018
You Won’t Finish This Article, Why people online don’t read to the end – Farhad Manjoo, 2013